Publication
Mis à jour
24 septembre 2020
IJN
LNC2

L'émergence de la monnaie du point de vue des sciences cognitives

Cette étude publiée le 15 novembre dans journal scientifique PNAS est le fruit de la collaboration entre des chercheurs de deux laboratoires de DEC, le Laboratoire de Neurosciences Cognitives Computationnelles (LNC2) et l'Institut Jean Nicod (IJN). Elle met en évidence les mécanismes cognitifs de base qui sous-tendent l'émergence de la monnaie. De simple mécanismes d'apprentissage par renforcement et de prise en compte anticipée de coûts d'opportunité sont suffisants pour la mise en place et la stabilisation des échanges monétaires. Elle étend également l'application des modèles d'apprentissage par renforcement à des environnements de décision économique plus complexe que ceux habituellement envisagés en neurosciences computationnelles. Cette étude constitue une avancée dans la compréhension des micro-fondations cognitives d'une institution macroéconomique complexe comme la monnaie. Elle pose les bases de futures explorations sur le thème de l'adéquation entre le cerveau humain et le fonctionnement des systèmes économiques.

 

PNAS
La monnaie est au centre de la vie économique. Elle est le lien particulier qui rattache l'individu au système économique dans son ensemble. Son efficacité tient au fait qu'elle réunit en un simple objet (pièce, billet, signaux électroniques, etc.) une série de propriétés remarquables: moyen d'échange, réserve de valeur, liquidité, fongibilité, unité de compte, facilité d'usage...

La manière dont la monnaie a émergé est une question centrale pour les économistes. Les auteurs de cet article se posent à leur tour la question suivante : quelles capacités de l'esprit humain sont nécessaires pour qu'un système d'échange monétaire se mette en place et se stabilise?

L'approche économique classique sur l'émergence de la monnaie présuppose une rationalité parfaite de la part des individus. Les auteurs montrent que des capacités très basiques de la cognition humaine suffisent au contraire à l'émergence de la monnaie, y compris dans ses usages complexes et sophistiqués comme la spéculation. Des modes d'apprentissage par renforcement prédisent mieux l'émergence de la monnaie que les modèles économiques basés sur des anticipations rationnelles. 

Il est donc frappant qu'un mécanisme économique aussi complexe que la monnaie ne requiert que peu de capacité cognitive humaine en vue de son fonctionnement. Mais précisément, on peut penser que la prévalence des échanges monétaires et la forme moderne qu'ont prise nos économies tient à cette facilité cognitive de la monnaie. Cet article invite donc également à une réflexion sur l'adéquation entre des capacités cognitives humaines limitées et la complexité de la vie économique.

L'originalité de cette publication vient de son angle d'étude tout à fait exceptionnel, celui des sciences cognitives. 


Référence : Lefebvre, Germain, Nioche, Aurélien and Bourgeois-Gironde, Sacha and Palminteri, Stefano (Nov. 2018). Contrasting temporal difference and opportunity cost reinforcement learning in an empirical money-emergence paradigmPNAS. DOI: 10.1073/pnas.1813197115
 

Contacts :

Sacha Bourgeois-Gironde – sbgironde@gmail.com
Institut Jean-Nicod 
UMR CNRS 8129
Pavillon Jardin
Ecole Normale Supérieure, 29 rue d'Ulm
F-75005 Paris, France 

Stefano Plaminteri - stefano.palminteri@ens.fr
Laboratoire de Neurosciences Cognitives Computationnelles
UMR INSERM
Ecole Normale Supérieure, 29 rue d'Ulm
F-75005 Paris, France